On n’est jamais trop prudent

Interloquée, Jeannine regarda sa montre. Il était déjà 12 heures 30. Plus qu’une demie heure pour se rendre sur place.

« Curieux ce message ! songea-t-elle. » L’homme n’avait rien exigé. Aucune rançon. Il est vrai que Mamie n’était pas riche et les parents de Juliette non plus. Il n’avait pas dit à quoi il ressemblait. Alors comment le retrouver dans la foule ? Sans doute connaissait-il Jeannine.

Mamie n’osa pas appeler les parents de Juliette. Elle avait trop peur de les inquiéter et qu’ils lui refusent désormais d’accueillir chez elle sa petite fille. Elle allait agir seule. Il fallait tout de même prendre ses précautions. On n’est jamais trop prudent.

Jeannine prépara un casse croûte pour Juliette : un bon morceau de son fromage préféré, une tranche de pain et une petite brique de jus d’ananas. Elle enfila son manteau, glissa son parapluie dans son sac à main. Le manche en était garni d’une boule en bois particulièrement dure, on ne sait jamais. Elle saisit les clés de l’appartement et sortit en claquant la porte.

Elle marcha aussi vit qu’elle put. « Heureusement que je fais de la gym deux fois par semaine, pensa-t-elle, ça entretient la forme. » Elle pouvait déjà apercevoir au bout de l’avenue la silhouette des montagnes russes se détacher dans le ciel de la ville.

En traversant le marché aux puces, elle ne put s’empêcher d’avoir un frisson en imaginant tout ce qui avait pu arriver à Juliette depuis qu’elle avait fermé la porte de sa chambre hier soir.

C’est alors que lui revinrent à l’esprit les paroles de l’antiquaire à qui elle avait acheté, la semaine dernière, la lampe de chevet pour la nouvelle chambre de Juliette : « Vous êtes sûre de vouloir prendre cette lampe ? avait-il demandé à Jeannine. Vous savez, avait-il ajouté d’un ton mystérieux, elle peut avoir des effets inattendus ! » Qu’importe, elle l’avait trouvée si jolie. De retour dans son appartement, elle l’avait aussitôt installée sur le petit guéridon juste à côté de la tête du lit de sa petite fille.